Coronavirus – « Oui, le pays était prêt » : l’effarante défense d’Agnès Buzyn face aux députés


En résumé : rien n'est de sa faute

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Mardi 30 juin, l’ex ministre de la Santé Agnès Buzyn se trouvait face à la commission d’enquête chargée d’auditionner les responsables politiques en lien avec la gestion de la crise sanitaire. Les 32 députés de la commission ont alors questionné, pendant plus de trois heures, celle qui a quitté le ministère de la Santé au début de la crise du coronavirus afin de représenter LREM aux élections municipales de Paris. Et sa défense pique un peu. 

Les masques et les tests

Alors qu’Agnès Buzyn assurait le 23 janvier dernier que la France était « extrêmement bien préparée » face à l’épidémie, les mois suivants ont eu tendance à démontrer, au contraire, un manque criant de masques de protection et de tests de dépistage. En ce qui concerne les masques, Agnès Buzyn s’est défendue : « la ministre n’a pas à connaître la totalité des produits en stock. […] Ce dont je dois m’assurer, c’est qu’il y a une chaîne de commandement et qu’il y a des gens en charge et que les doctrines sont publiées. Ça, je l’ai fait ». « La vigilance que je dois avoir, c’est sur des dizaines de produits », s’est-elle justifiée, tout en indiquant que les comprimés d’iode en cas d’incident nucléaire ou les tenues de protection face au virus Ebola n’étaient « pas moins importants ». Quant aux tests de dépistage, « l’objectif, c’était que tous les hôpitaux français aient accès aux tests. À l’époque [en février], on était sur quelques dizaines de suspicions de cas par jour. […] On était sur des dizaines de tests par jour ». « J’avais anticipé le besoin de faire plus de tests », a-t-elle ajouté. On a vu le résultat catastrophique de cette « anticipation » : pas de tests ni de masques durant de longs mois.

Sur la quantité ridicule de masques commandée le 30 janvier

Sur la commande d’un million de masques que la ministre a faite le 30 janvier alors que les besoins étaient de plusieurs centaines de millions de masques, elle retourne le problème en se réfugiant derrière ‘la doctrine de 2011″ et explique : « il n’y a pas de stocks d’État pour les masques FFP2 ». Elle se donne au passage le beau rôle : « Je me dis qu’il va falloir des masques, car je me projette toujours dans une infection virale, et je me dis que la doctrine de 2011 qui remet la responsabilité des masques FFP2 aux employeurs, aux hôpitaux, aux indépendants – parce qu’en réalité, dans la doctrine de 2011, c’est aux professionnels de santé de s’équiper eux-mêmes – je me dis qu’il vaut mieux commander des masques sans savoir les besoins de terrain, puisque les ARS ne m’ont pas encore répondu – je fais partir le 28 janvier une demande aux ARS de me faire remonter les besoins de terrain des établissements et des professionnels libéraux d’ailleurs – et je me dis en attendant cette réponse, commandons les masques et faisons un stock d’État qui n’existe pas ». Oui mais un million de masques seulement, Agnès, alors qu’il aurait fallu en commander préventivement plusieurs centaines de millions ! On apprend au passage que depuis 2011, l’État n’est plus responsable du stock de masque mais qu’il a délégué cette responsabilité aux entités privées ou publiques (sans débloquer les fonds nécessaires, bien sûr). Tout s’explique ! On a troqué notre sécurité pour économiser des bouts de chandelles, merci à ceux qui ont pris cette décision ! On attendra longtemps leur procès. Enfin, Agnès Buzyn nous apprend que le 28 janvier, elle demande aux ARS d’évaluer leur besoin en masques. Ceci est absolument effarant : ils ont littéralement improvisé et rien anticipé ! L’exact contraire que ce que l’ex ministre prétend.

D’autres stocks seraient périmés

La gestion des stocks de masques est évidemment en cause et Agnès Buzyn a répondu à cette question. Elle a expliqué avoir demandé une évaluation de la qualité des stocks à santé publique France et dit comprendre en 2018, soit un an et demi après sa demande d’évaluation, « qu’il y a énormément de choses périmées, mais pas que les masques, pas que les masques ! », « Le directeur général de la santé comprend tout d’un coup (en 2018) que beaucoup de choses sont périmées, les masques n’étant qu’une ligne parmi d’autres. » À partir de là, Agnès Buzyn déclare que Jérôme Salomon reconstitue progressivement tous les stocks (ce serait à vérifier, car pour les masques chirurgicaux, on a vu que les stocks étaient toujours très minces en 2020), mais pas que les masques, faisant comprendre par là que les masques n’étaient pas une priorité et que le budget alloué à ces questions stratégiques ne suffisait pas à faire des commandes massives de tous les produits périmés. Ils ont joué avec le feu (avec nos vies, pour être plus précis), et pas de bol, une pandémie s’est déclaré un an plus tard.

Sur la destruction des centaines de millions de masques périmés

Alors qu’en avril 2010 la France disposait d’un stock stratégique d’un milliard de masques chirurgicaux périmés et de 700 millions de masques FFP2 également périmés, Jérôme Salomon ordonnait en automne 2018 la destruction de 600 millions de masques chirurgicaux et de tous les masques FFP2. Mais Agnès Buzyn justifie cette décision en se retranchant derrière les normes de péremption des masques établies par les autorités sanitaires en 2014 : « Cette décision de la destruction des masques ne revient pas au ministre (…) mais est-ce que, en tant que ministre et en tant que médecin, j’aurais pris la responsabilité, alors qu’une agence certifiée me dit que des stocks ne sont pas conformes à une norme, de les remettre dans le circuit ? Je pense que je n’aurais pas pris ce risque et je pense que j’aurais validé totalement la destruction d’un stock ». Peut-être, mais pas avant d’avoir remplacé le stock ! Car mieux vaut un masque périmé que rien du tout ! Et même d’un point de vue politique sa position est indéfendable : que vaut-il mieux, se voir reprocher d’avoir conservé des stocks de masques périmés en attendant le renouvellement du stock, ou se voir reprocher d’avoir détruit des masques lorsque la crise sanitaire survient ? Evidemment, toute personne de bon sens aurait conservé ces masques tout en renouvelant vigoureusement le stock existant de masques, lesquels étaient d’ailleurs probablement toujours viables.

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La démission du gouvernement

Interrogée sur son départ du ministère, Agnès Buzyn estime avoir « fait la bonne préparation » afin de contrer la crise liée au coronavirus. Elle déclare même que « l’anticipation » en France a été « sans commune mesure avec les autres pays européens ». « Je quitte le ministère le 16 février. Il n’y a pas eu de cas nouveaux en France depuis neuf jours. […] La République en marche n’a plus de candidat à la mairie de Paris. Moi, j’estime que j’ai fait mon travail de préparation du système de santé », s’est-elle justifiée. Également, le choix de porter les couleurs de LREM aux municipales parisiennes n’était pas sans réfléchir, car selon l’ex-ministre, « le maire joue un rôle majeur dans les crises ». Un système de défense incroyable, basé sur la négation des faits : un système de santé à la dérive, des soignants qui manifestent depuis plusieurs mois avant la crise sans rien obtenir, un nombre de lits en réanimation en constante baisse depuis des décennies, pas de masques, pas de tests, une industrie exsangue, incapable de produire masques, tests et respirateurs rapidement, bref un fiasco total de la politique des gouvernements français depuis 40 ans, et face à ce tableau digne du radeau de la Méduse, Agnès Buzyn nous déclare comme une fleur : « nous étions prêts ». Il n’y a pas de mots pour décrire cela.

L’interview polémique

Concernant l’interview polémique donnée au Monde le lendemain du premier tour des élections municipales, Agnès Buzyn a estimé que ce n’était « ni une interview et encore moins une déclaration ». Le 17 mars dernier, l’ex-ministre déclarait en effet au Monde : « quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections municipales n’auraient pas lieu ». Des propos qui avaient véritablement heurté la Macronie, sidérée par de telles déclarations en pleine crise sanitaire. Agnès Buzyn s’est donc justifiée hier auprès de la représentation nationale : « j’avais passé une journée épouvantable. J’étais très fatiguée. On m’accusait sur les réseaux sociaux de n’avoir rien vu venir. C’est tout le contraire. Je me suis battue pendant un mois. […] Ce que j’ai dit au Monde ce jour-là, c’était « arrêtez de dire que je n’ai rien vu ». J’ai tout vu. Cet article laisse penser que je n’ai rien préparé ». On a rien compris à son explication alambiquée. Si quelqu’un a compris quelque chose, qu’il nous le dise en commentaire !

La France a fait mieux que les autres !

Pour l’ancienne ministre, la France était beaucoup mieux préparée que d’autres. « J’ai une expérience des risques sanitaires de par mon métier de médecin. […] Et donc je suis toujours dans l’anticipation », a-t-elle assuré. Agnès Buzyn a également déclaré que « nous n’avons pas cessé d’agir depuis le 10 janvier, date à laquelle nous avons connaissance qu’il s’agit d’un coronavirus », tout en rappelant que le gouvernement avait « anticipé par rapport aux alertes au niveau international ». Pour elle, la situation est claire : « vous ne pouvez pas dire que je n’ai pas anticipé et je ne laisserai pas dire que les services n’ont pas anticipé ». Pas les services, Agnès Buzyn, mais vous, qui avec vos prédécesseurs avez étranglé l’hôpital public, fait le choix de l’économie à celui de nos vies.

Tout cela devra être jugé un jour, et pas par une commission d’enquête de parlementaires mielleux.

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Antigouane
3 années il y a

Je ne comprendrai jamais pourquoi ils ont maintenu le premier tour des municipales.

DELBOS
3 années il y a

il faut foutre « toute cette crasse » dehors aux prochaines élections…..si elles ne sont pas « pipées » comme les précédentes….!

Marco
3 années il y a

Elle est LREM donc tout sera pardonné. Elle peut raconter ce qu’elle veut, elle est intouchable et elle le sait ! Du pipeau et personne pour lui poser des questions gênantes. Par ex la Chloroquine classée par elle comme substance dangereuse, du poison en somme !
Après ce sera un bon vaccin bien chère et obligatoire qui modifie l’ADN à vie.
Car ceci est LEUR PROJET.

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