Manque de matériel chez les sauveteurs : « les pompiers sont de la chair à canon »


La sortie de crise risque d'être mouvementée


La France est plus que jamais touchée par le Coronavirus. Nous comptons 58.441 cas recensés officiellement dans le pays pour 5.380 décès à l’heure où nous écrivons ces lignes. Souvent en première ligne, les sapeurs-pompiers se considèrent comme les grands oubliés de la crise par Macron et son gouvernement.

Extrêmement sollicités sur le front de la lutte contre l’épidémie, les pompiers « ne sont jamais cités dans les discours » du président de la République ou du Premier ministre, regrette Rémy Chabbouh, secrétaire national du syndicat Sud-Sdis (Services départementaux d’incendie et de secours). Alors que la colère du personnel hospitalier ne cesse de monter face aux manques de moyens, dans les casernes, le scénario se répète. L’État devra-t-il rendre des comptes une fois la crise passée ?

« Les pompiers sont furieux. L’heure n’est pas à polémiquer ou à faire grève. Mais après cet épisode-là, on aura des choses à régler avec le gouvernement, on ne va pas se laisser humilier de façon continuelle. Ça fait trop longtemps que ça dure », s’emporte toujours Rémy Chabbouh. « Nous sommes en première ligne et nous n’avons le droit à aucune reconnaissance. Pourtant, s’il y a des gens dans les hôpitaux, c’est bien parce qu’ils ont été transportés. Cela nous exaspère car les pompiers sont les éternels oubliés et n’ont aucune considération du plus haut niveau de l’Etat. On demandera des comptes car il ne faut pas se moquer du monde » conclut-il.

Les pompiers constatent une disparité des stocks de masques sur le territoire

« À Paris, nous avons 200.000 masques FFP2 et nous en utilisons environ 35.000 chaque semaine. Nous pouvons tenir jusqu’à la fin du mois environ », a indiqué le porte-parole de la brigade des sapeurs-pompiers, le lieutenant-colonel Gabriel Plus, dans une interview accordée hier au quotidien gratuit 20 Minutes. Le contrôleur général Pascal Lorteau a fait également savoir au journal qu’il n’y a pas, non plus, « d’inquiétude à avoir en Haute-Savoie » concernant une éventuelle pénurie de matériel de protection.

Mais la situation est loin d’être la même dans tous les départements de l’hexagone. « Depuis quelques jours, du matériel arrive au compte-gouttes. Mais il faut y faire attention car on est parti sur un marathon. Et j’ai peur qu’on n’arrive pas à tenir la distance. Pour les jours qui arrivent, ça va on a encore du matériel. Mais pourra-t-on tenir 15 jours ou trois semaines de plus ? Je ne suis pas sûr », confie encore Rémy Chabbouh. Le secrétaire national du syndicat Sud-Sdis « tire la sonnette d’alarme », car il a l’impression que les pompiers, dépourvus de matériel de protection, sont « envoyés au casse-pipe ». « Les Sdis voient leurs stocks qui fondent à vue d’œil », souffle quant à lui Jérôme François, secrétaire général de l’Unsa-Sdis.

Transport de malades et risques de contamination

Depuis le début du confinement, l’activité des pompiers a été profondément modifiée. En Haute-Savoie par exemple, elle a diminué de 40 %, notamment avec la fin de la saison de ski. « Les activités humaines ont été drastiquement réduites. Il n’y a quasiment plus de circulation routière, il y a beaucoup moins de chantiers. Conséquemment, il y a moins d’accidents de la circulation ou de travail », explique le colonel Pascal Lorteau, qui dirige les services d’incendie et de secours dans ce département. Partout en France, les pompiers recensent néanmoins toujours quelques accidents domestiques (bricolage, jardinage…) liés à l’obligation de rester à son domicile.

A contrario,  le transport de personnes malades est désormais l’activité principale des sauveteurs. Dans le Val-d’Oise par exemple, 70 % des déplacements sont effectués pour « des gens qui ont de la fièvre, de la toux, et qui sont emmenés à l’hôpital se faire tester », affirme Jérôme François. « Notre activité se concentre essentiellement sur le secours à la personne, le transport de personnes malades », renchérit Rémy Chabbouh, qui exerce dans le Rhône. « On a même fait des transferts interdépartementaux : on a rapatrié sur Lyon des personnes hospitalisées dans le Grand-Est. C’est quelque chose de nouveau ça, on n’en faisait pas avant » précise-t-il.

Les pompiers de Haute-Savoie ont d’ailleurs récemment été formés à « l’utilisation des équipements de protection individuelle » et ont donc dû adapter leurs modes de prises en charge des victimes. « Lors d’un secours ordinaire, vu que le virus circule librement au sein de la population et que la personne transportée peut être contaminée sans forcément présenter des symptômes, on lui fait porter systématiquement un masque chirurgical, tout comme le sauveteur qui est à son contact », souligne le contrôleur général Pascal Lorteau. Lorsque le cas est avéré, « on applique des mesures de protection maximales, c’est-à-dire le port d’une charlotte, de surchaussures et d’une blouse et l’utilisation de gel hydroalcoolique » explique-t-il encore.

Avec un risque de manque de matériel de protection, les pompiers redoutent de devenir des vecteurs majeurs de transmission du virus, et de contaminer leur famille, leurs collègues, les soignants… « Tous les gars qui passent leur journée dans les ambulances ont ça en tête quand ils rentrent chez eux. Quand tu es testé positif, tu ne regardes plus tes enfants comme avant », poursuit Jérôme François. Lui-même est tombé malade et a été confiné deux semaines après avoir procédé discrètement à un test dans un laboratoire privé. À noter que les dépistages des sauveteurs ne sont pas systématiques (contrairement à nos dirigeants…). Aucun pompier n’est pour le moment décédé du Covid-19, « il y en a quelques-uns en réanimation » et d’autres qui ont été placés en quarantaine, remarque Rémy Chabbouh, estimant que « les pompiers sont de la chair à canon ».

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Prevert
4 années il y a

Derrière les gendarmes, les policiers, les pompiers, les ambulanciers, ils restent le personnel des pompes funèbres. Invisibles parmi les invisibles.

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