Deux familles françaises ont déposé un recours devant le tribunal administratif contre l’État pour faire revenir leurs petits enfants retenus en Syrie.
Deux familles ont saisi la justice administrative pour qu’elle contraigne l’Etat français à rapatrier des enfants « en péril » actuellement retenus par les forces kurdes en Syrie après la mort de leurs parents jihadistes, a annoncé lundi leur avocate.
Deux grand-mères représentées par l’avocate Samia Maktouf ont saisi lundi le tribunal administratif de Paris d’un recours pour demander le retour de deux enfants retenus au camp de déplacés de Roj, dans la région autonome du Kurdistan syrien.
Des mineurs « face à un danger de mort certain »
« Le but est évidemment d’obliger la France, un Etat de droit, à réagir, d’autant qu’il s’agit de mineurs abandonnés faisant face à un danger de mort certain », a déclaré Me Maktouf.
Elle demande au tribunal qu’il oblige l’Etat à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour et par enfant.
« Cette mesure est d’autant plus urgente et indispensable que ces enfants ont des attaches familiales en France et que notre système judiciaire est apte à les prendre en charge », fait-elle valoir dans un communiqué.
Les enfants, une fillette aujourd’hui âgée de 5 ans et un garçon de 2 ans et demi, sont nés en zone irako-syrienne et ont perdu leurs parents pendant le conflit. La fillette, Z., était la fille d’un ouvrier du bâtiment « endoctriné » qui, à l’âge de 18 ans, avait quitté la France en 2012 avec sa compagne « convertie et radicalisée comme lui » avant de gagner la Syrie, selon la requête dont a eu connaissance l’AFP.
« Des conditions d’hygiène rudimentaires »
La mère du petit garçon, R., avait quitté la France en septembre 2014, aux débuts du califat. Brillante collégienne, elle se destinait à des études d’infirmières avant son « endoctrinement » sur internet par « un converti radicalisé européen ». Elle est décédée lors des bombardements de la coalition internationale sur Raqqa, tout comme son époux.
Les enfants « sont pris en charge à tour de rôle par des mamans, dans ce camp où les conditions d’hygiène sont rudimentaires », a déploré l’avocate.
Dans son recours, elle estime que la France, en s’abstenant de porter secours à ces enfants « en péril », méconnaîtrait les dispositions de la Convention de l’Onu relative aux droits de l’enfant, dont Paris est signataire, ainsi que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Saisi d’une demande similaire, un juge bruxellois avait contraint la Belgique fin décembre à rapatrier six enfants belges de jihadistes retenus avec leurs mères dans un camp kurde. Cette décision a été annulée en appel le 27 février.
Réticente au retour des adultes, la France s’est dite à l’automne ouverte au rapatriement des enfants, qui sont une centaine dans les camps en Syrie, à commencer par les orphelins. Mais sans donner de calendrier.
Cette démarche devant la justice administrative divise toutefois d’autres avocats de familles concernées. Les saisines de telles juridictions sont « nécessairement inefficaces et sans objet », en l’absence de représentation de l’Etat ou d’autorités consulaires en Syrie depuis 2012, soulignaient les avocats Marie Dosé, William Bourdon et Martin Pradel dans un communiqué le 28 février.