C’est un slogan qui revient dans les manifestations des Gilets Jaunes ou sur les pages Facebook du mouvement : « Macron destitution ». A la télévision, c’est un des fers de lance des Gilets jaunes, Maxime Nicolle, alias « Fly rider », qui a lancé le mot d’ordre : « Cela peut paraître bizarre pour certains ce qu’on souhaite… On demande la destitution d’Emmanuel Macron », a-t-il affirmé sur le plateau de Touche pas à mon Poste sur C8 la semaine dernière. Sur Internet, une pétition demandant la destitution du président de la République dépasse les 150.000 signatures.
Un article de la Constitution jamais utilisé
Pour appuyer leur demande, de nombreux internautes évoquent un passage de la Constitution : l’article 68.
« Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour », peut-on lire.
La procédure de destitution -qui n’a jamais été utilisée- été introduite en 2007 comme une contrepartie à l’immunité dont dispose le chef de l’Etat. A aucun moment, il n’est néanmoins précisé quelle est la nature des manquements qui pourraient conduire à une destitution du chef de l’Etat. Pour le constitutionnaliste Didier Maus, interrogé par Libération, il faudrait « soit que le président bloque le fonctionnement des institutions », en refusant de signer les lois ou en bloquant la Constitution par exemple, « soit que son comportement personnel soit indigne de sa fonction ».
C’est notamment l’ancien candidat à la présidentielle du parti pro-Frexit UPR François Asselineau qui a soufflé l’idée aux Gilets jaunes d’utiliser cet article. La vidéo publiée le 22 novembre et dans laquelle il expose cette idée a été partagée plus de 129.000 fois et a été vue par des centaines de milliers d’internautes. François Asselineau invitait notamment les Gilets jaunes à « aller chercher Macron » en demandant aux députés de lancer une procédure en « destitution » du chef de l’Etat pour « manquements graves » à « ses devoirs ». « Il n’y a pas besoin d’aller briser des vitres. Allez donc demander à vos députés de lancer l’article 68 de destitution de M.Macron. Voilà. Je vous donne des bons conseils », expliquait-il.
Pour aider les Gilets jaunes dans leurs démarche, l’UPR a diffusé sur son site internet une lettre type à envoyer aux députés et sénateurs : « Nous mettons en ligne ci-dessous le projet de lettre que nous conseillons à chaque citoyen français – et notamment aux « gilets jaunes » – d’adresser avec la date et sa signature à son député. Il suffit de faire un copier-coller de ce texte et de choisir entre Madame et Monsieur au début et à la fin de la lettre avant de l’imprimer et de l’envoyer à son député », peut-on lire.
La procédure n’a aucune chance d’aboutir
Pour être examinée, la proposition de résolution sur la destitution doit être motivée et signée « par au moins un dixième des membres de l’assemblée devant laquelle elle est déposée ». Théoriquement, 58 députés pourraient donc demander que soit examinée une demande de destitution d’Emmanuel Macron. Mais la requête n’aurait aucune chance d’aller plus loin. En effet, La République en Marche est majoritaire à l’Assemblée. Or, le rejet de la proposition de résolution par l’une des deux Assemblées met forcément un terme à la procédure. Le processus a été construit pour qu’il ne soit pas utilisé pour des motifs politiques. « Il n’est pas question ici de juger la politique menée par un Président mais d’apprécier son rôle comme gardien de la Constitution », confirme le constitutionnaliste Didier Maus.