Poutine à Rome : l’Italie, toujours un pied dans l’UE mais la tête déjà en Russie et en Chine



Vladimir Poutine est en visite à Rome le 4 juillet. Alors que le gouvernement italien tente de s’affranchir du dirigisme de l’Union européenne, et regarde ailleurs, l’Italie et la Russie partagent de nombreux enjeux géopolitiques et commerciaux.

Un peu plus de huit mois après la rencontre, à Moscou, entre le président du Conseil Giuseppe Conte et Vladimir Poutine, le chef d’Etat russe se rend à son tour en Italie le 4 juillet. Au programme : des entretiens tant avec le même Giuseppe Conte que le président italien Sergio Mattarella, mais aussi avec le pape François.

Et, comme en octobre 2018, les dirigeants européens suivront cette visite de Vladimir Poutine d’un œil attentif. De fait, depuis l’accession au pouvoir en juin 2018 de la coalition formée par le parti M5S (antisystème et eurosceptique) et la Ligue (souverainiste et anti-immigration), l’Italie s’émancipe toujours plus du giron de l’Union européenne (UE). Mais en cela, Rome ne fait que déployer plus clairement des orientations conformes à ses intérêts économiques et géopolitiques.

L’économie italienne plombée par le dirigisme bruxellois et les sanctions antirusses

De fait, l’Italie n’a jamais approuvé que du bout des lèvres la politique antirusse de Bruxelles, contraire aux intérêts de la troisième puissance économique de la zone euro – et du deuxième exportateur derrière l’Allemagne.

En 2015, en dépit de son positionnement résolument pro-UE, Matteo Renzi, alors président du Conseil italien, plaidait déjà pour un allègement des sanctions à l’encontre de Moscou. La critique timide des effets délétères des sanctions contre la Russie sur l’économie italienne n’avait pas suffit à dissuader les électeurs italiens de se saisir du référendum de décembre 2016 pour en faire un plébiscite anti-UE.

L’alignement de l’Union européenne sur la politique de punition américaine de la Russie pour son rôle supposé dans la crise ukrainienne en 2014 avait mis un terme brutal au boom des échanges commerciaux entre l’Italie et la Russie, à l’instar de l’industrie allemande et de l’agro-alimentaire français. Comme le soulignait le journal Les Echos en 2015, le commerce bilatéral des deux pays avait bondi de 327% entre 2000 et 2013, avant de se rétracter brutalement. Effet indirect des sanctions, la faiblesse de la monnaie russe, le rouble avait alors grevé les exportations du secteur du luxe italien vers la Russie. Une handicap de plus pour l’Italie, pays lourdement endetté et dont le secteur bancaire est très fragilisé par la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), mais dont le commerce extérieur était le seul voyant au vert dans les comptes publics.

Sanctions ou commerce avec la Russie ? Rome encore entre deux rives

Déjà en 2016, tandis que Matteo Renzi s’efforçait de modérer l’impact des orientations budgétaires européennes au niveau national, deux régions italiennes tiraient le signal d’alarme. En mai 2016, la Ligurie appelait Rome à reconnaître le rattachement de la Crimée à la Russie et à lever les sanctions.

En juillet de la même année, le conseil régional de Lombardie, la plus riche et la plus peuplée des régions italiennes, véritable cœur industriel du pays, adoptait une résolution exhortant Bruxelles à mettre un terme aux sanctions contre la Russie et reconnaître le droit à l’autodétermination de la Crimée.

Aussi, suivant cette tendance lourde longtemps occultée, le gouvernement italien issu de la cuisante défaite des partis pro-Union européenne aux élections législatives de mars 2018 n’a eu de cesse de dénoncer ces sanctions économiques, reconduites plusieurs fois par l’UE. Ultime relais de l’ingérence européenne dans la politique économique italienne, le président de la République italienne Sergio Mattarella échouait en mai 2018, à imposer un ancien cadre du Fonds monétaire international (FMI) à la tête d’un gouvernement technique.

L’Italie est le pays européen qui a le plus souffert de ces sanctions contre la Russie

Quatre jours seulement après la nomination de son gouvernement le président du Conseil italien Giuseppe Conte donnait le ton. «Nous serons les promoteurs d’une révision du système de sanctions [contre la Russie]», déclarait-il le 5 juin 2018 dans son discours de politique générale. En juillet suivant, le bouillonnant vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur Matteo Salvini promettait de mettre fin aux sanctions avant la fin de cette même année 2018.

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