Après avoir obtenu le feu vert de la NASA il y a deux mois, la société américaine SpaceX s’apprêtait hier à lancer dans l’espace deux astronautes américains. Par faute de mauvais temps, le lancement a été repoussé à samedi. Il s’agit toutefois d’une première pour une entreprise privée. Mais aussi, un virage stratégique pour les États-Unis qui dépendaient depuis près de dix ans des Russes pour envoyer leurs compatriotes dans l’espace. Une nouvelle ère est-elle en train de s’ouvrir, avec pour objectif la conquête de Mars d’ici 15 ans ?
Depuis le début des années 2000, la NASA a progressivement délaissé son programme de navettes, et donc de transport d’hommes dans l’espace. Les raisons sont principalement budgétaires. Sous la présidence Bush, le projet de confier à des entreprises privées le transport de matériel a été lancé. Cette idée a été reprise et complétée sous la présidence Obama, qui a autorisé le privé a travailler sur le transport d’astronautes.
À l’instar des européens, les Américains étaient devenus client des Russes. En effet, depuis 2011, les Soyouz étaient les seuls « taxis spatiaux » disponibles. Si les choses continuent d’évoluer positivement, les acheminements depuis la Floride redeviendront réguliers, avec plusieurs astronautes à bord. Les Américains ne dépendront donc plus de la Russie pour accéder à l’espace.
L’ovni SpaceX
Créée en 2002 et financée par Elon Musk, un excentrique milliardaire, avec sa propre fortune, SpaceX fait office de « start-up » face aux mastodontes installées que sont Boeing ou l’Européen ArianeGroup. L’entreprise se spécialise d’abord dans le transport de matériel et la mise en orbite de satellites. Pour se distinguer de ses concurrents, SpaceX développe des « fusées réutilisables », pouvant effectuer jusqu’à une dizaine de vols à moindre coût. Elle connaît néanmoins plusieurs échecs, comme par exemple en 2016 quand la fusée qui devait mettre en orbite un satellite pour Facebook, s’est écrasée.
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Quelques années auparavant, l’administration US mettait SpaceX en concurrence avec une autre entreprise américaine, le géant Boeing. Ce duel semble aujourd’hui largement remporté par la première. En 2010, Barack Obama déclarait :« certains ont dit que c’était infaisable ou imprudent de travailler avec le secteur privé de cette façon. Je ne suis pas d’accord ». L’hostilité du Congrès face aux prétentions de la start-up, était alors immense. En 2012, SpaceX devient pourtant la première société privée à amarrer une capsule de matériel à l’ISS (la Station Spatiale Internationale). Elle ravitaille depuis cette dernière régulièrement.
Deux ans plus tard, la Nasa passe commande pour y acheminer ses astronautes. La NASA paye plus de trois milliards de dollars ces entreprises pour qu’elles conçoivent, construisent, testent et opèrent une capsule pouvant envoyer à terme des astronautes dans l’espace. Une enveloppe globale moins onéreuse que les dizaines de milliards de dollars qu’ont coûté les systèmes précédents, développés en propre par la Nasa. Le développement connaît là-encore des échecs. Mais courant janvier 2020, SpaceX valide avec la NASA les derniers tests de sécurité pour l’envoi d’homme dans l’espace. Une première de nouveau pour une entreprise privée. Pendant ce temps, Boeing avec sa capsule Starliner, s’enlise dans le projet.
« SpaceX n’en serait pas là sans la Nasa », a déclaré Elon Musk après une répétition générale réussie d’un voyage sans humain vers l’ISS.
?️ @45thSpaceWing predicts a 60% chance of favorable weather for our #LaunchAmerica mission.
Prior to tomorrow’s launch, @SpaceX will bring the rocket horizontal to perform more preflight checkouts of the Falcon 9 rocket & Crew Dragon spacecraft: https://t.co/E6HXmwMkny pic.twitter.com/W5V4ohTH1s
— NASA (@NASA) May 26, 2020
Confier au privé les missions proches de la terre, pour se concentrer sur Mars
Tel est en substance, la nouvelle stratégie de la NASA. Si la Nasa pouvait confier « l’orbite basse » au privé, elle dégagerait des budgets pour ses missions plus lointaines. « Nous imaginons un futur ou l’orbite terrestre basse est entièrement privatisée, où la Nasa n’est qu’un client parmi d’autres », a déclaré en ce sens Jim Bridenstine, l’administrateur de l’agence. Avant de poursuivre : « sinon, nous n’irons jamais sur la Lune et sur Mars ».
SpaceX : le lancement de Crew Dragon est reporté à samedi à cause de la météo pic.twitter.com/nBHAj7L4Gg
— bertoni (@frederic555) May 28, 2020
Hier, 22H33 heure française, devait avoir lieu à Cap Canaveral en Floride, le premier lancement d’astronautes dans l’espace par SpaceX sur commande de la NASA. Donald Trump était venu assister au centre Kennedy à la consécration. Le président candidat républicain a réaffirmé la domination américaine dans l’espace, en annonçant un retour sur la Lune en 2024. Le nouvel objectif pour Mars serait 2035.
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