En France, les actionnaires et les dirigeants d’entreprise aiment dire qu’ils se sont faits tout seuls et qu’ils réussiraient mieux si l’Etat ne leur prenait pas tout. La réalité c’est que nous vivons dans une économie subventionnée où le contribuable doit verser chaque année des dizaines de milliards d’euros aux entreprises privées pour subventionner le maintien de l’emploi. Depuis plus de vingt ans, les gouvernements de droite, socialistes ou macronistes mettent en place des dispositifs de crédit d’impôts et d’exonérations de cotisations sociales aux entreprises privées, afin de « soutenir la compétitivité » et « créer de l’emploi ». L’année dernière, ces dispositifs réguliers se sont cumulés avec des secours exceptionnels comme le chômage partiel. Au total, nous avons versé en 2020 90 milliards d’euros aux entreprises, et très majoritairement aux grandes, puisque ces aides sont calculées en fonction du nombre de salariés. Plus on est gros, plus on gagne ! Et malgré cela, entre les suppressions de contrats précaires et les plans de licenciements visant les emplois en CDI, la France a perdu 500 000 emplois rien que durant le premier trimestre 2020.
En dix ans, l’entreprise pharmaceutique Sanofi a touché 1,5 milliards d’euros au titre du Crédit Impôt Recherche, un dispositif d’aide à la recherche et développement sans condition spécifique. Tout type et toute taille d’entreprise peut en bénéficier. Pourtant, même durant la terrible année 2020, Sanofi a versé 4 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires. L’entreprise pharmaceutique a aussi touché de l’argent public grâce au CICE, dispositif bien connu des Français puisque les gilets jaunes en demandaient la suppression. C’est chose faite en 2019, mais les 20 milliards versés chaque année aux entreprises ont été transférés vers une autre aide, cette fois-ci sous forme d’exonérations de cotisations sociales : Depuis le 1er janvier 2019, les entreprises privées ne payent plus toute une partie des cotisations patronales pour l’assurance maladie. C’est l’Etat, donc le contribuable, qui paye chaque année à leur place, pour un total de 22,6 milliards en 2020. A cela s’ajoutent les crédits qu’ils restaient à verser cette année-là sous forme de CICE, pour un total de 9 milliards d’euros ! Une entreprise comme Sanofi a donc touché des centaines de millions d’euros en 2020 au titre de dispositifs qui nous ont été vendus comme permettant « d’améliorer la compétitivité des entreprises », de favoriser « leur croissance » et en définitive « de créer de l’emploi ». Et pour quel résultat ? 400 postes vont être supprimés par Sanofi en 2021.
Des milliards distribués sans condition
Sanofi n’est pas la seule entreprise à prendre l’argent public et licencier quand même. C’est aussi le cas de Michelin (2300 postes supprimés), Renault (4600), Bridgestone (900), Camaieu (300), TUI France (317) … Auchan s’est aussi lancé dans le licenciement massif, alors que le groupe a touché près de 500 millions d’euros, rien que de CICE, depuis 2013. Ce ne sont que quelques exemples de plans de licenciements déclenchés par des entreprises qui ont pour point commun d’avoir absolument toutes reçues des millions d’euros d’aides publiques en 2020.
Comment en est-on si sûr ? Tout simplement parce que les 4 dispositifs de soutien permanents mis en œuvre sous Sarkozy, Hollande puis Macron sont sans conditions et favorisent principalement les grandes entreprises. En effet, puisque ces aides sont liées au nombre de salariés, les plus gros en attrapent le plus. Et comme en France, 7 salariés sur 10 travaillent directement ou indirectement (via des filiales) pour des groupes, ces derniers ont récupéré au moins 70% de la manne distribuée. Généralement défendues au nom du “petit commerçant qui galère”, de la “coiffeuse en difficulté”, ces aides bénéficient principalement à Total, Danone ou Sanofi.