Emmanuel Macron et ses ministres veulent y croire : le grand débat national serait sur de bons rails, une semaine après son lancement officiel. Le 13 janvier, dans sa lettre aux Français, le chef de l’Etat avait invité «le plus grand nombre» à participer à cette «initiative inédite» et à formuler des propositions pour «bâtir un nouveau contrat pour la nation». Censé se poursuivre jusqu’au 15 mars, le débat doit permettre à l’exécutif de répondre à des «questions essentielles» touchant à la fiscalité, aux services publics, à la transition écologique et à la démocratie et la citoyenneté. «Nous ne reprendrons pas le cours normal de nos vies», a juré Macron, tout en précisant que les changements à venir ne remettaient pas en cause les fondements d’une politique économique validée par les électeurs au printemps 2017.
« Croissance ».
C’est aussi ce qu’il a voulu rappeler lundi aux 150 grands patrons réunis au château de Versailles pour la deuxième édition de Choose France, rendez-vous annuel censé promouvoir les investissements dans l’Hexagone. Macron leur a fait savoir que ses réformes structurelles, comme celle du marché du travail, ne pouvaient être remises en cause par ce débat, mais que celui-ci offrait l’opportunité de réfléchir à «une croissance plus inclusive».
«Enfumage !» protestaient encore samedi dernier plusieurs dizaines de milliers de gilets jaunes mobilisés pour l’acte X de leur mobilisation. A l’extrême droite comme à l’extrême gauche, on dénonce une manœuvre de diversion dont la seule raison d’être serait de gagner du temps et d’étouffer la colère. Mais dans les autres partis comme dans plusieurs syndicats et organisations professionnelles, on se dit prêt à jouer le jeu, tout en s’interrogeant sur le grand flou qui entoure la restitution et l’exploitation de ce qui remontera du terrain. Le parti de Laurent Wauquiez, Les Républicains, entend participer «pour que le pays sorte du chaos». Yannick Jadot et les écologistes souhaitent, eux, que cela soit l’occasion de conclure, partout en France, des «contrats territoriaux de transition écologique».
Tout en maintenant qu’ils n’avaient pas vocation à être «les animateurs d’un débat décidé et organisé par l’Etat», le président LR de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, a indiqué lundi que ces derniers favoriseraient «toutes les remontées». Au passage, il veut faire émerger la demande d’une «grande loi de décentralisation». C’est aussi le souhait de Dominique Bussereau (ex-LR), président de l’Assemblée des départements de Frances (ADF), qui a annoncé que les principales associations d’élus présenteraient dans les prochaines semaines «une proposition commune de participation au débat».
« Diversité ».
Du côté du gouvernement, on assure ne pas s’inquiéter du foisonnement de propositions qui partent dans tous les sens. Tout en se félicitant que quelques idées nouvelles viennent «revivifier le débat», une source ministérielle reconnaît qu’elle attend surtout de ce grand brainstorming qu’il mette au jour «la grande diversité des points de vue» ainsi que «les injonctions contradictoires» adressées au gouvernement. Les deux ministres chargés d’animer le grand débat, Emmanuelle Wargon et Sébastien Lecornu, ont soumis lundi leur méthodologie aux «garants» indépendants nommés la semaine dernière par l’exécutif et les présidents des assemblées. Ces cinq «sages» présenteront ce mardi leurs préconisations.
Alors que les premiers débats ont eu lieu le week-end dernier, près de 600 événements sont recensés sur la plateforme dédiée. Près de la moitié d’entre eux est organisée par des maires. Les autres par des particuliers ou des associations. Selon un sondage Odoxa pour le Figaro, publié en fin de semaine dernière, 94 % des Français ont entendu parler du grand débat. Même s’ils doutent encore très majoritairement de son utilité et de son impartialité, 29 % se disent prêts à y participer. Soit un total très théorique de 13 millions de contributeurs.