A Paris, un projet spectaculaire pour l’île de la Cité



EXCLUSIF – Le JDD dévoile le rapport très attendu sur l’avenir de l’île de la Cité, le « cœur de Paris », remis vendredi soir au président de la République.

L’architecte Dominique Perrault propose d’ici à 2040 une gigantesque dalle transparente à la place du parvis de Notre-Dame. (dpa-adagp Missioniledelacité.Paris)

Le parvis de Notre-Dame recouvert d’une immense dalle de verre au-dessus de la crypte archéologique ; aux pieds de la cathédrale, un débarcadère et des plates-formes flottantes accueillant piscine, cafés, restaurants, salles de concert ; le long de la Seine, une longue promenade végétalisée, débarrassée des voitures, reliant les pointes aval et amont de l’île ; deux nouvelles passerelles qui franchissent le fleuve ; un peu partout, des verrières, des passages couverts, des galeries souterraines, des atriums en sous-sol…

Voilà quelques-unes des 35 propositions – spectaculaires – contenues dans le rapport remis vendredi soir au président de la République et à la maire de Paris dans les salons de l’Élysée. Ce document de 56 pages, que le JDD a consulté en avant- première, a été rédigé par l’architecte Dominique Perrault (le concepteur de la BNF, à Paris) et le président du Centre des monuments nationaux, Philippe Bélaval. Le tandem avait reçu en décembre 2015 une lettre de mission de François Hollande, « en accord avec Mme Anne Hidalgo », demandant une vision de l’île de la Cité « à l’horizon des vingt-cinq prochaines années ». Dans la lignée des grands projets présidentiels…

Ce rapport rappelle que « la dernière intervention d’ensemble des pouvoirs publics sur l’île est celle du baron Haussmann ». Après plus d’un millénaire de présence humaine, le centre névralgique de la capitale se trouve face à une « opportunité unique » d’écrire une nouvelle page de son histoire. Le Palais de justice déménagera en 2018 aux Batignolles (17e) – sauf la cour d’appel et la Cour de cassation ; de même, la PJ quittera le 36 quai des Orfèvres en 2017 ; les prérogatives de la préfecture de police doivent changer avec la réforme du statut de Paris ; et l’Hôtel-Dieu est en pleine restructuration. La piéton­nisation des berges rive droite aura un « impact considérable » sur l' »île monument » en vis-à-vis. Sans oublier la possible organisation des JO en 2024 et de l’Exposition universelle en 2025.

Réveiller le « cœur battant de la ville »

Pour Dominique Perrault et Philippe Bélaval, l’île de la Cité « ne parvient pas à incarner [sa] fonction de cœur battant de la ville ». L’architecte observe que « les Parisiens la fréquentent très peu, sauf quand ils y sont convoqués ». Elle ne dénombre d’ailleurs qu’un petit millier d’habitants… Et beaucoup d’appartements loués sur Airbnb. Les touristes, eux, affluent : 14 millions de visiteurs par an à Notre-Dame, un million à la Sainte-Chapelle, 500.000 à la Conciergerie, « mais ils ne restent pas sur l’île ». « L’île de la Cité n’est plus qu’un labyrinthe de citadelles administratives », de « blocs monolithiques difficilement perméables », décrit le rapport. « L’objectif de notre travail est de proposer des mesures pour réveiller le cœur historique, géographique – avec le kilomètre zéro – et affectif de Paris et de la France en le transformant », souligne Philippe Bélaval.

L’architecte-urbaniste et le spécialiste du patrimoine estiment que ce territoire insulaire de 22 hectares n’est « pas achevé ». Mais « il est exclu d’y ajouter de nouveaux bâtiments ou de construire en hauteur », concèdent- ils. Ils proposent tout de même de « créer environ 100.000 m² nouveaux – valeur foncière dépassant le milliard d’euros – sans transformation radicale ». Comment? En construisant une dizaine de couvertures de verre et d’acier au-dessus des nombreuses cours intérieures, souvent utilisées comme parkings aujourd’hui. Le Palais de justice, le tribunal de commerce, l’Hôtel-Dieu seraient ainsi dotés de grandes verrières.

La grande cour d’honneur du 19-Août, au sein de la préfecture de police, serait, quant à elle, recouverte d’une immense rotonde de verre. Un « passage parisien » public traverserait également le bâtiment. Ces interventions « légères et transparentes » permettraient de libérer des espaces, en particulier dans la préfecture de police, pour y implanter des logements, des services de proximité et des commerces. Plus détonnant encore, les rapporteurs suggèrent d’édifier une grande serre de plusieurs étages, une « sorte de « Crystal Palace » », pour abriter l’actuel marché aux fleurs et aux oiseaux.

La promenade de la rive gauche de l’île de la Cité. (dpa-adagp Missioniledelacité.Paris)

Interdire ou pas la circulation automobile

La mission propose une autre utilisation massive et sensationnelle du verre et du métal : le parvis de Notre-Dame, long de 135 m et large de 100 m, pourrait être entièrement vitré. « La façade de pierre de la cathédrale va se refléter sur ce sol en verre, lequel permettra de baigner la crypte archéologique de lumière naturelle, et de faire le lien avec la Seine », imagine déjà Dominique Perrault. Son condisciple précise : « Cette proposition fera peut-être débat, mais nous sommes prêts à répondre aux éventuels détracteurs. En sous-sol, les millions de visiteurs qui patientent [[aujourd’hui]] sous la pluie ou la canicule disposeront de services indispensables, comme des toilettes ou une bagagerie. » Ou encore des commerces. Ainsi qu’un accès à la station de métro. L’idée est de récupérer les deux niveaux supérieurs des parkings souterrains pour leur conférer d’autres usages. Entre les différents bâtiments de l’île, le sous-sol serait truffé de passages souterrains facilitant la circulation.

Les quais sud de l’île de la Cité seraient entièrement piétonnisés et végétalisés, et les places de stationnement « bannies », entre la pointe du square du Vert-Galant, en aval, et celle du mémorial des Martyrs de la déportation, en amont. Un « balcon de l’île » verrait ainsi le jour, le long duquel seraient amarrés des bateaux et autres barges abritant des activités de restauration, de vie nocturne, de loisirs divers. Quai de Montebello, un débarcadère dédié au transport fluvial de passagers permettrait d’accoster directement sous le nouveau parvis. Deux passerelles piétonnes s’élanceraient au-dessus du fleuve, l’une vers la rive droite (quai de la Mégisserie), l’autre vers la rive gauche (Saint-Michel), au niveau du 36 quai des orfèvres.

Accélérer l’aménagement

L’actuelle rue de Lutèce, au cœur de l’île, deviendrait une « place majeure », animée et identifiée par un pavement spécifique, « telle la place Saint-Marc de Venise ». La mission souhaite aussi interdire aux voitures le pont de l’Archevêché qui débouche, au sud, dans le square Jean-XXIII. Mais elle considère que « l’on ne peut, en aucun cas, se passer de la circulation automobile dans le périmètre de l’île de la Cité ». Une position que ne partage par la Ville de Paris, décisionnaire : « Il est évident qu’à horizon 2040 le trafic automobile n’aura plus sa place sur l’île, à l’exception des bus, des véhicules de la préfecture de police et de l’AP-HP », précise l’entourage de la maire.

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Krebs
5 années il y a

On est en droit de s’interroger sur le comment de ce projet ?

Chevalier
5 années il y a

l’incendie de Notre-Dame fait tout d’un coup sens……

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