VIDÉOS – Le primat des Gaules a annoncé sa démission lors d’une courte allocution à Lyon ce jeudi à 13 heures. Il a été reconnu coupable de non-dénonciation d’abus sexuel dans son diocèse et condamné à six mois de prison avec sursis un peu plus tôt dans la matinée. Ses avocats ont déjà annoncé leur intention de faire appel.
Séisme dans l’Église de France. Le cardinal Barbarin a annoncé sa démission ce jeudi à 13 heures lors d’une déclaration. «J’ai décidé d’aller voir le Saint-Père pour lui remettre ma démission», a annoncé le prélat depuis la maison diocésaine de Lyon. Cette annonce intervient quelques heures après sa condamnation à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé les agressions pédophiles dans son diocèse. En avril 2016, aux débuts de l’affaire, l’archevêque avait déjà proposé sa démission mais celle-ci avait été refusée par le Pape.
Absent lors du jugement, le cardinal Barbarin a été «déclaré coupable de non-dénonciation de mauvais traitements envers un mineur entre 2014 et 2015», selon les mots de la présidente du tribunal correctionnel de Lyon, Brigitte Verney. L’archevêque de Lyon continue de clamer son innocence, et ses avocats ont d’ores et déjà annoncé leur volonté de faire appel. C’est la troisième fois qu’un évêque est condamné en France pour des faits similaires, après deux autres cas en 2001 et en 2018. Les faits concernent les agressions supposées du père Preynat – il n’a pas encore été jugé – à l’encontre de jeunes scouts dans les années 1980 et 1990. «Je prends acte de la décision du tribunal. Indépendamment de mon sort personnel, je tiens à redire toute ma compassion pour les victimes», a déclaré Mgr Barbarin.
Le jugement pointe la responsabilité du cardinal et ses mauvaises décisions. «Philippe Barbarin a fait le choix en conscience, pour préserver l’institution à laquelle il appartient, de ne pas les transmettre à la justice. […] En voulant éviter le scandale, causé par les faits d’abus sexuels multiples commis par un prêtre, mais sans doute aussi par la mise à jour de décisions bien peu adéquates prises par les évêques qui le précédaient, Philippe Barbarin a préféré prendre le risque d’empêcher la découverte de très nombreuses victimes d’abus sexuels par la justice, et d’interdire l’expression de leur douleur.»
Un procès au cœur de la tempête médiatique qui secoue l’Église catholique
La décision est contestée par la défense du cardinal. «La motivation du tribunal ne me convainc pas, a déclaré son avocat Jean-Félix Luciani. Nous allons donc contester cette décision par toutes les voies de droit utiles». Pour l’avocat, il «était difficile pour le tribunal de résister à une telle pression avec des documentaires, un film… Ça pose de vraies questions sur le respect de la Justice». Mgr Barbarin jure n’avoir appris les faits qu’en 2014, quand une victime se confia à lui: «Je n’ai jamais cherché à cacher, encore moins à couvrir ces faits horribles», déclarait-il en janvier lors du procès.
Soutenus par l’association de victimes «La Parole libérée», neuf hommes avaient d’abord accusé le père Bernard Preynat d’avoir abusé d’eux avant de porter plainte contre ceux qui selon eux n’ont rien dit des agissements du prêtre. Faute de poursuites, ils ont lancé en 2017 une procédure de citation directe devant le tribunal, qui leur garantissait un procès pour la première fois depuis la révélation de l’affaire fin 2015.
François Devaux, co-fondateur de «La Parole libérée», démentait à l’AFP tout «acharnement contre la personne» de Mgr Barbarin. Il considérait cependant «important que ce débat ait eu lieu au sein d’un tribunal», puisque «le pape ne prend pas ses responsabilités pour appliquer la tolérance zéro qu’il prône depuis des années» sur les agressions sexuelles dans l’Église.