Vers de farine, huile de moteur sur les ingrédients, insalubrité, gaspillage : l’enquête choc dans une usine Buitoni


Par Sharon H. pour Mr Mondialisation

En novembre 2019, l’usine mère de l’enseigne Buitoni ouvrait exceptionnellement ses portes au public pour qu’il constate l’irréprochabilité du lieu. Son directeur souhaitait ainsi montrer au consommateur que « peut-être, il fait pareil à la maison » . Pourtant, derrière ces opérations de communication, se cache une toute autre réalité qu’un employé nous rapporte en exclusivité sur Mr Mondialisation.

Insalubrité, gaspillage alimentaire systématique, omniprésence du plastique, sous-effectifs, provenances douteuses des produits : le site de production de 15 000 m2, situé à Caudry dans le nord de la France, fabrique des pizzas surgelées dans des conditions accablantes. Enquête en images, depuis l’intérieur du bâtiment.

Buitoni, c’est 150 000 à 200 000 pizzas surgelées produites par jour dans le monde et une pizza vendue toutes les deux secondes en France. Une telle quantité n’est possible qu’avec des procédés industriels un maximum automatisés. Mais encore aujourd’hui, la marque aime se présenter comme une petite entreprise familiale :

« Depuis plus de 180 ans, avec BUITONI® c’est toute la générosité et la convivialité italienne que l’on invite à sa table pour partager de vrais bons moments simples et chaleureux, en famille ou entre amis. Fondée en 1827 par Giulia Buitoni (« Mamma Giulia ») à Sansepolcro, petit village au cœur de la Toscane, BUITONI® est une marque authentiquement italienne. La qualité des produits BUITONI® s’appuie sur un savoir-faire hérité de ses racines italiennes » .

Si l’histoire commence bien en 1827 sur l’idée et le savoir-faire d’un couple d’artisans italiens, dès 1988, elle prend un tournant radicalement industriel avec le rachat de l’enseigne par le géant Nestlé. Depuis plus de 20 ans, le groupe aux mille et uns scandales – allant du lait infantile contaminé au travail des enfants, en passant par la déforestation et l’exploitation de l’eau douce – est donc aux commandes du logo italien.

L’influence n’a pas tardé à se faire sentir : en 2013, Buitoni se retrouve également pris dans un méfait notoire, celui de la viande de cheval, et doit retirer les produits concernés de la vente. Mais quand le mot d’ordre d’un modèle est rendement, l’ampleur des infractions commises ne se limite pas à quelques esclandres.

Vers de farine, huile de moteur en contact avec les ingrédients, machines insalubres, gâchis alimentaire routinier, usage intensif de plastique… loin des discours marketing, immersion dans le quotidien de l’usine de production des pizzas surgelées Buitoni, grâce à notre lanceur d’alerte.

Bien qu’il n’y ait rien d’étonnant à imaginer que les industriels jettent fréquemment de la nourriture encore consommable, pour des raisons qu’on suppose de « conformité » ou de calibrage propres au mode de production mécanisé et intensif, il est moins courant de pouvoir en prendre la mesure à travers un cas précis. Dans le centre Buitoni, qu’on appelle aussi la SPAC (société de produits alimentaires de Caudry), ce ne sont pas quelques produits qui sortent des lignes de fabrication, mais des tonnes journalières, à toutes les étapes.

Et tout commence dès le pétrissage de la pâte. Travaillée dans des robots dédiés, elle repose ensuite dans des cuves. Problème ? Il arrive fréquemment qu’au moment des relèvements d’équipes, en sous-effectifs et principalement composées de postes précaires en intérim, la pâte reste seule trop longtemps.

De quoi laisser agir la levure : la pâte gonfle et une grande partie tombe au sol. Selon l’employé, ce genre d’événements n’est pas accidentel, mais la conséquence d’une ligne de conduite généralisée et assumée au sein de l’usine : la priorité est au rendement, et il est plus avantageux sur le plan organisationnel et financier de maintenir la course sans se soucier des pertes importantes jugées inévitables.

Ce dogme donne lieu à une normalisation des pertes sur tout le circuit. Une problématique dont la direction a totalement conscience, l’information lui étant remontée quotidiennement via des bilans et registres papiers.

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Avlula
3 années il y a

Encore une délégation de confiance trahie (on confie la production de nourriture à une entreprise spécialisée, censée la faire de façon optimale, rationalisée, scientifique/technique, contrôlée, élue par le scrutin démocratique du marché et du vote par l’argent, et voilà le résultat, il faut encore qu’un lanceur d’alerte prenne un gros risque pour faire éclater la vérité cachée).

Autre question, une seule usine comme ça, ça équivaut à combien de particuliers en terme de gaspillage ? Pourquoi embêter tout le monde alors qu’on pourrait commencer par améliorer un endroit fait pour ça ?

Last edited 3 années il y a by Avlula

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