Source : Le vent se lève
Auteur : Augustin Herbet
Les élections européennes de mai 2019 auraient été le théâtre d’une « vague verte », si l’on en croit la couverture médiatique qui en a été effectuée. Au-delà des manchettes de journaux, elle témoigne surtout de la recomposition du bloc néolibéral. Les principaux partis « verts » européens, bien loin d’incarner l’aspiration à une écologie populaire qui se renforce de jour en jour sur le vieux continent, se présentent comme les garants du statu quo. Refusant de remettre en cause les structures économiques et institutionnelles dominantes à l’origine du désastre environnemental, ils récoltent les suffrages traditionnellement destinés aux sociaux-démocrates.
L’écologie serait-elle devenue le supplément d’âme des classes supérieures ? Un simple rouage du système politique dominant ?
Le succès relatif des partis « verts » européens peut s’expliquer par trois facteurs. La préoccupation écologique est devenu une préoccupation politique cruciale à la faveur de l’aggravation du réchauffement climatique et de ses conséquences visibles, notamment par le biais des phénomènes climatiques extrêmes. Ils ont su s’appuyer sur des groupes sociaux en expansion, en possession d’un très fort capital culturel par le biais de diplômes. Enfin, ils ont adopté un logiciel gramscien, sortant l’écologie de la case gauche radicale où elle était enfermée, et n’hésitant pas dans certains cas – allemand et finlandais en l’occurrence – à s’adresser clairement à l’électorat de droite sensible aux thèmes écologistes. En agissant de la sorte, ils ont pu adopter une position relativement centrale et attirer un nouvel électorat. Mais ces succès peinent à cacher les limites bien plus importantes des écologistes.
LES LIMITES À CES SUCCÈS
En premier lieu, les partis écologistes se situent malgré tout massivement à gauche. Or, leur succès n’a pas entraîné une progression du bloc de gauche et, leurs progrès se sont faits essentiellement au détriment des autres partis du bloc de gauche. Leurs conquêtes indéniables d’un électorat de droite ont été contrebalancées par des pertes plus importantes de la gauche au profit de l’extrême droite.
L’Allemagne constitue un exemple éloquent de ce phénomène, où la progression des Verts de 9.3 % aux européennes ne compense pas la baisse des sociaux-démocrates du SPD de 11.4 % et celle de 2 % de Die Linke lors de la même élection. Le gain de 7 points de la Groenlinks néerlandaise aux législatives se fait avec une perte de 19 points du parti travailliste néerlandais. Enfin, la gauche luxembourgeoise ou finlandaise reste stable mais est minoritaire depuis au moins 20 ans. L’écologie « de gauche », nouvelle sociale-démocratie naissant dans les ruines de celle-ci, mais sans modifier le rapport de force politique ?
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