LA PROTECTION ANIMALE – Les Reportages de Vincent Lapierre


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Ils sont bénévoles à la SPA ou à la fondation Brigitte Bardot, militants pour un régime sans viande ou encore manifestants pour l’abolition de la corrida, réunis avec leurs compagnons à poils longs ce dimanche 30 septembre 2018 à Bordeaux, pour la deuxième édition de « l’Animal’s Pride ». Leur but, éveiller les consciences sur les réalités de la souffrance animale : abattage, abandon, maltraitances parfois élevées en traditions… Alors comment évolue la loi à ce sujet ? Et que peut-on faire concrètement pour alléger cette souffrance ?
Les récentes attaques de boucheries soulèvent également la question de l’attitude de certains protecteurs des animaux vis-à-vis des humains ; en effet la sensibilisation aux atrocités de la surconsommation de viande peut-elle avoir recours à son tour à la violence envers les acteurs de ce commerce, puisque la considérant moindre en comparaison ? Vincent Lapierre était sur place pour recueillir les opinions souvent tournées en dérision de ces défenseurs de la cause animale.

Et Dieu créa la Femme qui préféra les Animaux (aux hommes)

 

On dit que les animaux n’ont pas de conscience, mais ce n’est pas vrai : leur conscience s’appelle « Brigitte ». Pas Macron, mais Bardot. Depuis que la star mondiale numéro un est descendue de son piédestal, elle a touché terre et décidé de se vouer aux plus faibles d’entre nous. Raillée au début, car on ne se déleste pas comme ça d’un statut de superstar que les autres vous ont taillé et qui en profitent, Brigitte a tenu bon, contre vents et marées. Malgré une presse rageuse, son franc-parler a fait mouche, touchant le cœur des gens, et la marraine des animaux a effacé BB. Pour continuer à vivre, Brigitte a tué Bardot.

 

Brigitte, la Tour Eiffel et le Général

 

Ou les trois piliers de la France. Résumé des 30 Glorieuses qui ont hissé la France au firmament culturel et politique des années 50 aux années 70. Après, les choses ont quelque peu changé. Brigitte a dîné chez le Général, fréquentait les Pompidou, donc les Rothschild, puis tout le gratin mondial. C’était la star nationale numéro 1, loin devant Delon et Belmondo, et aussi la star internationale numéro 1, trône qu’elle partageait avec Marilyn. Mais Marilyn est morte, d’un suicide plus ou moins aidé, et Brigitte a survécu. Pourtant, Brigitte a souvent attenté à sa vie, et s’en est sortie de justesse. Chance, bon ADN, intuition des proches, notre BB nationale aurait pu partir dès le début des années 60, en pleine gloire. Elle appelait ces tentatives des évasions.

 

La gloire, elle avait commencé à 14 ans, après son premier accessit de danse, avec une couverture du magazine Elle (1950) sur laquelle un réalisateur avait flashé, car la jeune fille avait un quelque chose qui ressemblait à l’époque : au début des années 50, elle symbolisait ce mélange explosif de la jeune fille de bonne famille sous laquelle couvait déjà le volcan du changement, celui de la scandaleuse, de la subversive, celle qui éclatait la gangue de la bonne éducation. Dans la famille Bardot et dans beaucoup de familles catholiques, actrice rimait avec « putain ». D’ailleurs, dans l’exposition universelle de 1958 à Bruxelles, le pavillon du Vatican illustrera le Mal par… une photo de Bardot !

 

Et Brigitte avait reçu une très bonne éducation, bourgeoise de ses parents, dans une grande famille comme tout le monde en rêve : des oncles super, des tantes à l’ancienne, des mamies affectueuses, des papis merveilleux qui racontaient des histoires de l’ancien temps, une sœur Mijanou un peu chieuse qui captait tout l’amour de maman, un père unique, l’usine familiale des frères Bardot, qui avaient été Poilus, bref, l’image d’Epinal de famille heureuse élargie. C’est sûrement ce qui a donné à Brigitte la structure métallique nécessaire pour tenir au milieu de l’enfer médiatique. Car l’enfer est arrivé très vite.

 

Star malgré elle

 

Après la couverture d’Elle, après les premiers spectacles sur scène, très vite, le cinéma, à 16 ans, avec ce diable de Roger Vadim, grand trousseur de jeunes filles. Un Pygmalion dont toutes les filles de l’époque auraient rêvé : beau, jeune, romantique, russe, connecté, ayant un pied dans les médias, un autre dans le cinéma, un prince moderne bourré de projets qui cherchait sa princesse. Et Brigitte est la monture idéale : jeune, belle, sexy, timide, merveilleusement ingénue, c’est une pâte magnifique pour en faire une vedette. Vadim ne s’est pas trompé, sauf sur une chose : ce n’est pas une vedette que Brigitte va devenir, mais une méga star. Un cyclone qui va dévaster le monde, de Mexico à Madrid, en passant par New York et Acapulco.

 

Vadim va allumer la mèche avec des films légers, bien dans l’air du temps, sa bombe sexuelle entre les mains. Très vite, face aux vedettes bien sages de l’époque, Brigitte fait figure de compétitrice hors pair, de concurrente qui n’obéit pas aux mêmes règles : elle dévaste tout. Sa filmographie est sans importance, à part deux ou trois œuvres qui resteront, des films qu’elle jouait de la cuisse gauche. C’était l’occasion de voyager, puis de retrouver son petit chez-soi de l’avenue Paul Doumer, dans le XVIe arrondissement de Paris. Puis, bientôt, les cachets tombant, à La Madrague, que le monde entier connaît.

 

Une Madrague qui deviendra le centre de la fête people, on ne disait même pas encore « people » mais jet set, ou happy few : milliardaires, playboys, groupies, chanteurs, acteurs, tout un monde de la chanson et du cinéma passera dans cette petite baraque sans confort, au milieu des chiens et des chats que Brigitte recueillera au gré de ses pérégrinations. Ce ne sera pas encore le cœur de son refuge, puis celui de Gennevilliers, dont elle réussira à améliorer l’ordinaire. L’amour absolu des animaux s’imposera plus tard, après la grande déception du monde des hommes.

 

Sexe, mensonge et cinéma 

 

Car des hommes, elle en a connus, et à la pelle. Pas nymphomane mais butineuse, la petite abeille habillée en hippie chic n’aura de cesse de chercher l’homme idéal, qui évidemment n’existe pas. Elle s’essayera à tous les genres : le milliardaire bavarois à la Gunter (Sachs), le gigolo glandeur et profiteur à la Patrick, l’opportuniste à la Sacha (Distel), l’acteur, le musicien, le joueur de poker, le sportif skieur ou amateur de foot à la télé… Bref, un tableau de chasse aussi éclectique qu’impressionnant pour celle qui détestait la chasse. Pour un peu, elle aurait pu accrocher les têtes de ses conquêtes dans le salon de La Madrague !

 

Sachant chasser l’homme mais aussi le jeter, Brigitte sera comme une boule d’acier dans un océan de quilles, des quilles qui faisaient la queue, attendant leur tour. Elle était « la » femme à posséder, mais elle glissait entre les pattes ou les griffes de tous. Même ses producteurs se sont arraché les cheveux, car BB pouvait renoncer à un scénario en dernière minute, ou renoncer à voyager en avion, si elle ne pouvait pas accéder au tournage dans sa Rolls personnelle bourrée d’animaux. Caprices de star ? Pas sûr, plutôt une préservation de soi, car dès le début des années 50, elle ne s’appartenait plus.

 

Elle appartenait aux médias, au cinéma, à la politique, à la France. Bardot était son double, et Brigitte essayait tant bien que mal de vivre normalement, au milieu de ses amis, de sa famille, de ses mamies, de ses bonnes et de ses animaux, quittant dès qu’elle le pouvait la violence inimaginable de la surmédiatisation. Une tempête énorme, permanente, impensable, qui aurait tué n’importe qui. Brigitte a survécu à Bardot, c’est rarissime.

 

BB à l’abattoir de la célébrité

 

Il fallait échapper aux foules cannibales dont chacun voulait son morceau de Brigitte, aux journalistes dont chacun voulait son scoop sur Brigitte, jusqu’à publier une photo d’elle où elle embrasse son papa chéri et titrer qu’elle se tapait un vieux… La colère et la rage n’y faisaient rien, Brigitte ne pouvait rivaliser avec cette puissance monstrueuse qu’est la presse à sensations, comme on la disait à l’époque. Elle devait répondre avec ses propres armes, entourlouper le chaland en jouant l’aguicheuse, la scandaleuse, la putain mondiale. Donner à manger aux foules en essayant de ne pas disparaître dans le tourbillon.

 

Brigitte, bien loin d’être une putain dans le civil, était sur les écrans du monde celle qui pouvait déstabiliser n’importe quel couple. Les femmes mariées la détestaient, les jeunes femmes l’adoraient, car elle était le modèle du pouvoir qui allait changer de mains, des années plus tard. Une sorte de féminisme avant l’heure où la femme, en utilisant habilement ses charmes, pouvait vendre chèrement sa peau aux hommes. Brigitte faisait monter les enchères en échauffant les esprits, et ne se gênait pas pour demander toujours plus. L’insolence de la jeunesse et de la beauté à qui rien ne résiste. À 30 ans, elle avait déjà tout vécu.

 

Cette folie publique ne pouvait être équilibrée que par une contre-folie privée. Il fallait alors bétonner une stabilité pour ne pas devenir folle, et celle-ci lui était apportée par ceux qui ne parlent pas, qui donnent de l’affection sans compter, et qui ne trahissent jamais : les animaux. Son appartement et ses maisons successives, que ce soit sur la Côte d’Azur ou autour de Paris, à Bazoches dans le canton de Monfort L’Amaury (Yvelines), devinrent des refuges pour les damnées de la Terre, ces bêtes qui souffraient du mauvais traitement des hommes.

 

Brigitte, animal innocent maltraité par les hommes

 

Brigitte devait se sentir comme ces animaux sans défense devant la violence médiatique, elle s’est senti un destin commun avec les bêtes affolées aux maîtres indignes. Elle était ce petit chat apeuré, maigre à faire peur, qu’elle récupéra au Mexique mais qui ne put l’accompagner aux USA, normes sanitaires obligent, ou Kapi, ce chien à moitié fou qui mordait tout le monde – sauf les voleurs – et qui atterrira à La Madrague pour la plus grande peur de ses amis fêtards.

 

Brigitte, au fur et à mesure de sa déception et de son dégoût de la sphère des hommes, construira naturellement une bulle affective avec des animaux blessés et enfin chéris, bulle dans laquelle elle se retirera après la dernière réplique de la dernière scène de son dernier film, le 6 novembre 1973. Elle refusera tout ce que son agent, la fidèle Olga, lui proposera, même pour se refaire la pelote. Elle aura fait entre temps quelques disques (avec Gainsbourg), quelques émissions de télé, qui toutes cartonneront.

 

L’amour des animaux, c’est d’abord le dégoût de les maltraiter, de les tuer et de les manger, depuis la première cervelle d’agneau dans son assiette d’enfant ou Noiraud le lapin familial passé en civet. Brigitte n’aura de cesse de ressentir de l’empathie pour ses « semblables »… mais pas pour les humains ! Sauf les souffrants : mamies abandonnées (Suzon), femmes perdues (madame Renée)… Brigitte entretiendra ainsi un parc d’oubliées sociales. Elle leur offrira jobs, appartements, cadeaux, et veillera sur elle jusqu’à leurs derniers instants. Malgré sa peur, son incompréhension et son dégoût de la mort, elle tiendra la main de ces exclues sociales avant l’heure pour les accompagner jusqu’à la frontière de l’au-delà.

 

Le paradis des animaux

 

Ses animaux, ce sera Guapa, la petite chienne apeurée sauvée d’une pendaison par Jicky, son frère en amitié, une bâtarde que Brigitte ramènera dans tous les palaces du monde au grand dam des maîtres d’hôtels. Je fais ce que je veux et je vous emmerde, c’était le mot d’ordre de la star. On était loin des divas sophistiquées des années 60 avec leurs colliers de perlouses et leurs manteaux de fourrure ! Brigitte, c’est pieds nus dès qu’elle le peut, un chien et une chèvre sur son lit dans la suite, et vogue la galère !

 

Il y aura Chorro, l’âne refilé par son producteur Raoul Lévy, Rikiki le petit balai brosse, le chien kangourou à deux pattes dans une Espagne de misère que Brigitte ne ramènera pas, comme les taureaux qu’elle ne sauvera pas – difficile de les prendre avec soi –, l’agneau Nénette, l’ânon Cornichon, Mariquita le petit canard que le réalisateur Louis Malle devra prendre en considération sur le tournage mexicain de Viva Maria (1965), Charly le berger allemand qui dévorera Nénette pendant l’absence de leur maîtresse… Plus tous ceux du refuge pourri de Gennevilliers, qu’elle adoptera en masse et qu’elle fera adopter de force par son entourage cinématographique ! Tous enfants de Brigitte, qui n’avait pas su être une mère pour son fils Nicolas. Les chasseurs et les empoisonneurs de Bazoches tueront beaucoup de ces bêtes, n’améliorant pas l’idée que BB se faisait de la race humaine…

 

Jean-Paul Steiger, le premier à avoir infiltré un abattoir, dès 1962, révèlera à la France les conditions indignes d’abattage des animaux de boucherie. Il sera le déclencheur de la vocation de Brigitte, qui n’aura alors de cesse de faire changer la loi et la perception sur les animaux, même ceux destinés à l’assiette. Elle mettra son immense renommée au service des plus faibles, une mère Teresa des animaux. Le président Giscard lui donnera de nombreux coups de main, notamment pour l’arrêt des expériences sur les babouins à Bron en 1980 : ils étaient utilisés comme cobayes lors d’accidents de la route non simulés… Aujourd’hui, ils ont été remplacés par des robots infestés de capteurs.

 

Aujourd’hui, en novembre 2018, le combat continue.

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Tom
5 années il y a

Outre la sincère bienveillance de ces gens à l’égare des animaux, qui est un point positif, on remarquera que le français qui se remet en question est incapable de penser en dehors de l’autocritique ! Dès lors le problème est que l’on porte un combat sans vouloir le gagner pour le réel, on ne le porte que moralement. Selon moi, cette morale dont la limite de dénonciation s’arrête à sa propre sphère est inconsciemment induite par de longue année d’excuse et d’à-plat-ventrisme face à la politique de la culpabilisation. (ces mouvements n’étant pas de gauche pour rien) On peut entendre… Lire la suite »

betty manai
5 années il y a
Reply to  Tom

C’est complétement faux Tom.En dehors de ce que tu as vu et entendu on se bat au quotidien pas que moralement mais physiquement c’est une souffrance permanente,des combats à travers toute la France et le reste du monde.Ce mouvement comme tu dis n’a rien de politique,juste humain Renseigne toi.On est des martyrs? pas nous non mais ce qu’on fait endurer aux autres par juste un égoîsme tel qu’il nous étouffe aujourd’hui .Renseigne toi auprès des gens qui savent YANN ARTHUS PHILIP WOLLEN HENRI SPIRA GARY YOUROFSKY et j’en oublie On se bat main dans la main avec le reste du… Lire la suite »

Tom
5 années il y a
Reply to  betty manai

Bien, c’est bien ce que je disais, vous ne voyez rien en dehors de l’autocritique et préférez vous considérer comme  »apolitique » c’est à dire  »ne pas se mêler du problème dans le dure mais quand même en parler à sa propre échelle » ce qui est de l’ordre de l’évitement. Vous n’avez pas compris ce que j’ai écris,  »martyre » n’était pas à prendre au sens brute du terme mais au sens morale. Je réexplique donc : -Quand ma nièce participe à une excursion visant à la sensibiliser les enfants sur le climat, elle apprend beaucoup de choses et se responsabilise, c’est… Lire la suite »

Cliewre
5 années il y a

Je suis d’accord avec la grande majorité de ce que les gens disent dans ce reportage mais certains clichés persistent. « On n’aime pas les animaux dans notre assiette, on les aime en train de courir dans les champs »… oui certes, mais si on ne consommait pas de viande ou de produits dérivés, toutes ces espèces animales auraient disparu de la surface de la terre… mais on peut très bien préférer cette option, je le conçois. Je trouve l’élevage intensif immonde en terme de bien être animal et le bémol que je voulais apporter là concerne surtout la production… Lire la suite »

cascador
5 années il y a

Je reste quand même perplexe face à l’énergie déployée par tous ces gens pour améliorer la vie des animaux alors que des humains crèvent dans la rue et que des bébés de 1 ans meurent de cancer. Mais nous n’avons pas tous le même sens des priorités.

Alex
5 années il y a

J’ai vu que ER taille Vincent dans la dernière vidéo de Soral en reprenant un extrait de cette vidéo pour illustrer que Vincent ne serait plus dans le combat militant… Pour ma part je trouve le sujet pertinant et intéressant et conforme à ce que Vincent à toujours fait. La cause animale étant d’ailleurs un vrai sujet de société. Je reste fidèle à ER (malgré leurs éternels excès) pour leur pertinence et leur courage… mais tout mon soutien à vous ! Union du peuple, toujours

33yoyo33
5 années il y a
Reply to  Alex

+1 je pense la même chose que toi. Soutien à Vincent et son combat qui est le notre.

LeDebeulyou
5 années il y a

Vincent… celle a 5:05 était clairement sous le charme

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