POLITIQUE. Plusieurs maires de la Gironde ont interpellé le chef de l’Etat sur les manifestations des « gilets jaunes » qui se poursuivent chaque samedi, et se terminent parfois dans la violence
Emmanuel Macron a appelé les « gilets jaunes » à un « retour au calme » vendredi à Bordeaux, bastion du mouvement où le président se rendait au dernier jour de la carrière politique du maire Alain Juppé.
Il organisait un débat avec une cinquantaine de maires du département, à la résidence préfectorale. A 150 mètres de là, sur la place Pey-Berland, où samedi après samedi des heurts éclatent en fin de manifestation des « gilets jaunes », une centaine de manifestants s’étaient rassemblés dans le calme. « Macron, c’est bon, dégage ! », scandaient certains d’entre eux. Dans la matinée, ce sont des commerçants bordelais durement touchés par ces manifestations qui avaient tenté d’interpeller le chef de l’Etat.
Le doyen des maires de France demande que cesse « le défilé insupportable »
Emmanuel Macron a été sollicité sur ce sujet des « gilets jaunes » par plusieurs maires présents au débat, preuve que le sujet reste très présent en Gironde. Ainsi,Marcel Berthomé, doyen des maires de France qui, à 96 ans, va entamer en 2020 la cinquantième année de son mandat de maire à Saint-Seurin-sur-L’Isle, a demandé que cesse le « défilé insupportable » des manifestants « rebelles ».
Même indignation du côté de Michel Dufranc, maire de La Brède, et par ailleurs avocat à Bordeaux. « Mon cabinet est ici, à côté de la mairie de Bordeaux, a-t-il expliqué. Chaque samedi nous venons travailler encadrés par les gendarmes mobiles. Mes locaux sont préservés mais ceux de mes voisins commerçants ne le sont pas. Il y a une situation tout à fait scandaleuse qui se répète semaine après semaine. Jusqu’à quand ? L’autorité de l’Etat est en question. Lorsque des troubles graves se produisent, on peut interdire des manifestations. Entendez-vous donner des instructions dans ce sens ? »
« Interdire les manifestations serait sans effet »
« Le pays a besoin d’un retour au calme, a martelé Emmanuel Macron. La situation que nous vivons n’est plus compréhensible par nombre de concitoyens, et [il faut que] chacun revienne au civisme, à la civilité, à la capacité de vivre ensemble et à accepter les accords et désaccords. Une société démocratique dans laquelle chacun peut exprimer le moindre de ses désaccords, y compris dans la violence la plus extrême, c’est intolérable, et à la fin c’est la négation de la démocratie. »
Emmanuel Macron ne pense pas en revanche qu’interdire de manifester serait une bonne solution. « Nombre de manifestations se tiennent déjà sans autorisation, a rappelé le chef de l’Etat, et interdire les manifestations serait sans effet. Est-ce que nous pouvons aller plus loin ? J’ai décidé de ne pas revenir à l’Etat d’urgence. On ne décide pas l’Etat d’urgence quand il y a des tensions sociales dans le pays. Nous avons fortement renforcé les sanctions, elles seront encore renforcées, maintenant chacun doit revenir à la raison. J’espère que les semaines qui viennent permettront de voir une décrue. »
Un maire inquiet de la montée du RN dans le Médoc
Bernard Guiraud maire DVG de Lesparre-Médoc, est lui intervenu pour parler des difficultés de son territoire, où le mouvement des « gilets jaunes » a trouvé un large écho. « Une problématique de notre territoire médocain, c’est qu’il est à la fois mondialement connu pour l’excellence de son vignoble et qu’il subit un sentiment de délaissement des pouvoirs publics. »
A tel point, s’inquiète-t-il, « que lors des dernières élections départementales, deux conseillers du Rassemblement National ont été élus […] et il n’attend que les élections municipales de 2020 pour conforter ses positions. » Le maire en a appelé à l’Etat, notamment pour boucler deux projets structurants aujourd’hui à l’arrêt sur ce territoire, « au potentiel énorme ».