Lors d’un discours prononcé ce samedi 7 décembre dans la ville d’Hollywood en Floride à l’occasion d’une réunion de l’IAC (le Conseil Israélien Américain, organisation ayant pour but d’encourager le soutien de la communauté israélienne américaine à l’état hébreu), le Président américain a affirmé qu’Israël «n’a jamais eu de meilleur ami à la Maison Blanche ». À travers cette phrase, le Président prouve qu’il est déjà en campagne pour sa réélection. Et ce n’est pas le premier soutien majeur de l’administration Trump à Israël.
Yesterday, President @realDonaldTrump delivered remarks at the Israeli American Council National Summit. pic.twitter.com/jEP6p2T9D2
— The White House (@WhiteHouse) December 8, 2019
Le mois dernier, le 18 novembre, l’administration américaine actuelle s’était distinguée des précédentes via la voix du secrétaire d’état Mike Pompeo. «L’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international», avait-il fait savoir, en désaccord avec l’ONU sur cette question. Il y a 6 mois de cela, le 25 mars 2019, le locataire de la Maison Blanche signait un décret reconnaissant la souveraineté d’Israël sur le Golan, territoire conquis en 1967 à la Syrie lors de la guerre des Six Jours, puis annexé en 1981. Le monde arabe et la communauté internationale ont condamné fortement et quasi-unanimement les deux décisions.
Il y a deux ans quasiment jour pour jour (le 6 décembre 2017 NDLR), Les Etats-Unis reconnaissaient officiellement et pour la première fois Jérusalem comme capitale d’Israël. Selon Donald Trump, « Plusieurs Présidents ont dit qu’ils voulaient faire quelque chose [de semblable] et ils ne l’ont pas fait.» L’Autorité palestinienne et la communauté internationale ont là-encore condamné quasi-unanimement. En effet Jérusalem-Est, annexée illégalement par Israël en 1967, est également revendiquée par les Palestiniens comme Capitale. Ils espèrent eux aussi depuis de longues années une reconnaissance internationale.
Une stratégie électoraliste
Le statut de Jérusalem est donc l’une des principales questions sur lesquelles se déchirent Israéliens et Palestiniens. Cette reconnaissance était en fait une promesse de campagne de 2016. Alors que les prochaines élections américaines auront lieu dans moins d’un an, le 3 novembre 2020, Donald Trump a ainsi fait campagne pendant son discours devant l’IAC. Lors de ce dernier, il a rappelé son engagement pour Israël depuis son entrée en fonction et s’est décrit comme son meilleur ami. Précisons que la communauté juive ne représente pas une part très importante en nombre d’électeurs aux États-Unis. Toutefois son importance pourrait être décisive en Floride, un «swing states», soit un état stratégique dans le système américain, où il pourrait faire basculer l’élection.
Face à une communauté qui vote historiquement largement en faveur des démocrates, Trump reprend l’une de ses anciennes recettes déjà utilisées auprès de la communauté noire avec son célèbre « What the hell do you have to lose? ». Sous-entendu, pourquoi vous obstinez à voter démocrates alors que j’ai fait mes preuves ?
Donald Trump’s pitch to black voters: « What the hell do you have to lose? » https://t.co/4CsNLkqLcQ pic.twitter.com/CSbFUCktf2
— CNN (@CNN) 20 août 2016
(En substance à la communauté noire américaine : « Depuis toujours vous votez démocrates. Vos écoles ne sont pas bonnes, vous êtes pauvres […] Qu’avez-vous à perdre à essayer Trump ? Bon sang, qu’avez-vous à perdre ? »)
L’administration américaine a déjà fait plusieurs cadeaux au gouvernement Netanyahou, dictés sans doute par un agenda de politique intérieur. « Pour se présenter dans les conditions les plus favorables à l’élection présidentielle, il a besoin du très puissant lobby pro-israélien. En prenant cette initiative, il coupe l’herbe sous le pied de ses adversaires démocrates en mettant de son côté ce lobby complètement ravi de cette décision » avait déclaré l’analyste géopolitique Bruno Guigue suite à la reconnaissance du Golan. Des cadeaux qui auront pour beaucoup de spécialistes des impacts dans la région, avec le risque d’une montée encore plus forte du fanatisme religieux. Pour Anne Giudicelli, spécialiste du monde arabe et musulman, «tout choix politique ou diplomatique a un impact dans la région».
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Depuis son entrée en fonction, Donald Trump a bousculé plusieurs décennies de politique étrangère dans cette région du monde.
S’il revendique une nouvelle approche sur le conflit israélo-palestinien, Donald Trump a aussi de nombreuses fois assuré comme un fil rouge, qu’il ferait son possible pour qu’un accord de paix soit trouvé. Malgré la multiplication des signaux positifs envoyés à l’état hébreu, il semble toujours croire en son plan de paix pour la région. Cette mission a été confiée à son gendre Jared Kushner, l’un de ses hauts conseillers. Néanmoins, la crise institutionnelle et politique inédite qui secoue Israël ces derniers temps, semble retarder la divulgation de ce plan. En effet, Benyamin Netanyahou et son opposant Benny Gantz n’ont pas réussi à former un nouveau gouvernement suite aux dernières élections législatives. De nouvelles élections, les troisièmes en un an, pourraient se tenir. L’administration Trump souhaite quant à elle aller plus vite et ne pas attendre un hypothétique second mandat pour divulguer ses intentions. «Beaucoup de gens disent que ça ne peut pas se faire […] Ils disent que c’est l’accord le plus dur à conclure, mais si Jared Kushner n’y arrive pas, on ne peut pas y arriver», a d’ores et déjà prévenu le locataire de la Maison Blanche.
Rappelons que Donald Trump est New-yorkais et qu’il a réalisé de nombreuses affaires dans cette ville où la communauté juive est très présente. Certains comme Serge July, parlent de « la première ville juive du monde ». Rappelons également que l’actuel Président républicain a milité de nombreuses années chez les démocrates, avant 1987 puis de 2001 à 2009… Trump ne semble pas mentir lorsqu’il se dit le meilleur ami d’Israël. Il n’a en réalité aucune raison de le faire. En tant que populiste et sur une ligne « america first », il a tout fait semble-t-il pour se rapprocher fortement d’un allié historique et stratégique, et dont l’approbation via l’AIPAC est indispensable pour pouvoir appliquer sa politique intérieure.
Finalement, par ce message d’amour à Israël, Trump se couche ostensiblement pour accroître ses chances de se faire réélire, comme tant d’autres avant lui…
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Mouai, il cherche à se faire réélire en effet, on est encore à fond dans le symbolisme, ça ne veut donc pas dire grand chose au final. S’il fait la guerre à l’Iran comme le souhaite mémère Clinton ou s’il bombarde la Palestine, là d’accord, on sera sorti du symbole mais d’ici là franchement, pas grandes conclusions à tirer.
Je peux bien me tromper. Mais j’ai l’impression que tout ça, c’est du vent. Trump a manifestement le désir de se retirer du Moyen Orient. S’il tarde à le faire, sa valse hésitation est sûrement liée à des contraintes intérieures de l’«État profond» et de ceux qui en tirent les ficelles. Pour le reste, Trump s’est fendu en belles paroles verbales et orales en faveur d’Israël, mais qui ne changent pas grand chose : «Don» de Jérusalem et transfert de l’ambassade US, «don» du Golan syrien occupé, et maintenant cette grande déclaration d’amour à laquelle il a manqué le bouquet… Lire la suite »