Avec Boris Johnson premier ministre, quel Brexit, quand et comment?



FOCUS – Élu à la tête du Parti conservateur par une large majorité par de ses membres, «BoJo» doit dès mercredi former un nouveau gouvernement. Favorable à l’option d’un Brexit sans accord s’il n’obtient pas une réouverture des négociations avec Bruxelles, le prochain premier ministre devra affronter un Parlement divisé.

La presse britannique décrit souvent Boris Johnson comme brouillon bien que brillant et volontiers outrancier quoique cultivé. L’ancien maire de Londres évite ainsi au maximum les débats techniques sur le fond des dossiers pour afficher un volontarisme à toute épreuve, mais qui manque parfois de consistance. Que peut donner cette posture pour le Brexit?

Fort de sa large victoire mardi 23 juillet à la tête du Parti conservateur, le futur premier ministre britannique, que la reine doit charger mercredi de former le prochain gouvernement, n’aura guère le temps de profiter de son nouveau statut. Succédant à Theresa May, qui a vu son accord de Brexit négocié avec Bruxelles rejeté trois fois par la Chambre des communes, Boris Johnson aura pour principale mission de mettre en œuvre la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, repoussée à maintes reprises depuis le référendum de juin 2016.

Le 11 avril dernier, lors d’un Conseil européen réunissant Theresa May et les 27 chefs d’État et de gouvernement des États membres, la nouvelle date butoir a été fixée au 31 octobre. BoJo, comme est surnommé le nouveau premier ministre britannique, a promis de se tenir strictement à cette nouvelle échéance, coûte que coûte, autrement dit avec ou sans accord. Depuis la campagne du référendum pendant laquelle il a été l’une des deux principales figures du Leave avec Nigel Farage, l’ancien maire de Londres n’hésite pas à se prononcer en faveur d’un «no deal» en l’absence de meilleure alternative. Un scénario toujours refusé par Theresa May. Comme les partisans d’un «Brexit dur», Boris Johnson répète un refrain que sa prédécesseur a longtemps entendu: mieux vaut pas d’accord qu’un mauvais accord. Les critiques de Boris Johnson, comme une large majorité des conservateurs, portent principalement sur la procédure de «backstop» négociée par Theresa May et l’Union européenne, mécanisme permettant d’éviter un rétablissement de la frontière entre les deux Irlande, mais qui maintiendrait le Royaume-Uni au sein de la législation européenne pour une durée indéterminée, ce qui fait bondir les «Brexiters».

Des difficultés à venir à la Chambre des Communes

On sait donc à peu près ce que Boris Johnson ne veut pas – l’accord de Brexit de Theresa May – mais moins ce qu’il veut et surtout comment il peut l’obtenir. La Commission européenne a d’ores et déjà fait savoir que l’accord de Brexit était définitif et ne pourrait pas être renégocié, ligne rouge que la nouvelle présidente de l’institution bruxelloise, Ursula von der Leyen, ne devrait pas remettre en cause, selon toute vraisemblance. Ces derniers mois, Theresa May avait elle aussi annoncé qu’elle ouvrirait une renégociation sur certains points suscitant le rejet des parlementaires britanniques, mais sans succès. Dès lors, en l’absence de renégociation de l’accord, c’est l’option du «no deal» qui interviendrait au 31 octobre, à moins qu’un énième report finisse par être décidé. Bruxelles l’envisagerait, mais BoJo l’exclut catégoriquement. C’est la méthode du nouveau premier ministre: rester optimiste permettrait en l’occurrence de changer bien des choses. «Là où il y a de la volonté, il y a une solution», déclare-t-il à l’envi. Avec une certaine grandiloquence, qu’il affectionne, Boris Johnson a profité de l’actualité pour dresser un parallèle entre le Brexit et les premiers pas sur la Lune. «S’ils ont pu revenir dans l’atmosphère terrestre en 1969 avec un code informatique tricoté main, nous pourrons résoudre le problème d’un commerce sans frictions à la frontière nord-irlandaise», a-t-il écrit dans sa dernière tribune avant un moment au quotidien Telegraph.

«Le nouveau premier ministre aura besoin de transmettre son optimisme comme s’il était un cycliste dopé aux stéroïdes cherchant à gagner le tour de France», note de son côté dans le Sun , avec un brin de scepticisme, Jacob Rees-Mogg, chef de file des «brexiters durs» à la Chambre des Communes, qui remarque qu’il y a «très peu de temps et beaucoup de choses à faire». Le député conservateur argue de l’urgence de négocier des accords commerciaux avec l’Europe et le reste du monde, ce que l’UE refuse de faire tant que le Brexit n’a pas eu lieu, et de préparer la période transitoire en cas de «no deal», c’est-à-dire si les tarifs douaniers de l’Organisation mondiale du commerce s’appliquaient automatiquement au lendemain du 31 octobre alors que Londres faisait jusqu’ici partie de l’union douanière avec l’UE.

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